Le Docteur André Mairey 1914 - 2006
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Tenter une bibliographie sur le Docteur Mairey peut paraître présomptueux pour un club du Doubs.
Pourtant, lors de rencontres avec des spéléos ou compagne/amis de spéléos des années 1950, ce nom revient systématiquement.
Bien que décédé le 8 avril 2006, à l’age de 92 ans, le GSAM n’a jamais rencontré Mairey, dommage, mais nous tentons de réparer ce fait par ce modeste article.
Cet article est à but participatif. En effet, bons nombres ont encore le souvenir présent de ce personnage charismatique. Le but est donc d’avoir des témoignages permettant d’alimenter cet article.
Le seul survivant du Drame de La Creuse, 1950
Le drame de La Creuse a laissé des traces indélébiles dans le milieu de la spéléologie et au-delà. L’article remarquable de Claude retrace cette tragédie.
Les 6 disparus
Le Docteur Mairey fut le seul survivant.
On ne peut imaginer les trente heures d’angoisse à La creuse alors que l’eau en furie lui arrivait aux narines.
L’épopée de La Pierre Saint-Martin, 1952-1953
De gauche à droite : André Treuthard et son ami André Mairey
Le "Toubib" a participé aux deux illustres campagnes d’exploration à la Pierre Saint-Martin. Voir l’article sur son ami André Treuthard.
Le 13 août 1952, alors que le spéléologue Marcel Loubens épuisé décide de remonter à la surface, le câble qui le tracte lâche soudainement provoquant une chute de 15 mètres.
Tazieff écrit dans son ouvrage " Le Gouffre de la Pierre Saint-Martin" :
Je pense au docteur Mairey descendant pour aller soigner Loubens, soutenu par le câble qui venait de céder sous le poids de son ami. Et ce même docteur Mairey et Tazieff, restés les deux derniers dans le gouffre, trouvent encore la force et le courage de donner à l’expédition son véritable caractère. Ils ne remonteront pas avant d’avoir réalisé le projet de Loubens : poursuivre l’exploration. Et c’est, dans cette ambiance tragique, une véritable écouverte : une salle immense, magnifique, la salle Marcel-Loubens, prolongée par une vaste galerie et une puissante rivière souterraine.
L’exploration aux Cavottes, 1952-1954
Grotte des Cavottes à Montrond-le-Château, 1954 (?)
Dans le groupe de gauche à droite :
Le docteur Mairey, mauer x 2 ? ils sont deux frères ?, Billuard , Contejean
En 1952 , le Groupe luron "Raoul Simonin" (l’une des 6 victimes à La Creuse à Blamont") a invité le GS Doubs à l’exploration du réseau inférieur des Cavottes - découvert en partie depuis peu, par des membres de ce groupement haute-saônois devenu alors indépendant ...
Les témoignages :
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Cliché aimablement transmise par Monsieur Condé
On reconnait le Docteur Mairey à Gauche et à droite ?
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Le témoignage de Robert MAUER (GSD) :
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Dans le Spelunca N°104 de décembre 2006, à la page 62, Robert MAUER rend hommage à son compagnon d’explo :
Comment parler à l’aise de ce personnage aux multiples facettes ?
Le GS Doubs ne l ’a bien connu qu’en 1952 lorsque, avec son Groupe luron " Raoul Simonin " (l’une des six victimes de la Creuse à Blamont), il nous a invités à l ’exploration du réseau inférieur des Cavottes - découvert en partie depuis peu, par des membres de ce groupement devenus alors indépendants (ce qui amena à l ’époque, quelques difficultés vite apaisées, avec J.-M. Bourquin l’inventeur véritable de cette nouvelle partie de la Grande Caverne). J’avais ensuite noué une grande amitié avec celui-ci, malheureusement interrompue par sa disparition prématurée. Durant ces expéditions longues et mouvementées, en plusieurs épisodes, nous avions découvert un personnage au charisme extraordinaire voire indéchiffrable à certains points de vue. Nous nous plûmes d’emblée et des belles explorations aux Cavottes, sortirent une assez longue et régulière collaboration.
Avec lui, pendant plusieurs années, nous avons " écumé " le patrimoine karstique de notre région (souvent deux ou trois cavités par jour ).
Ce qu ’il nous a appris là, c ’est la juste appréciation, ou plutôt, le mépris des difficultés et comment s’y prendre avec les " emmerdements " divers, propres à ce métier. Le paradoxe est que sa première incursion souterraine avait été à la Creuse et deux ans seulement auparavant. Cette compétence était donc totalement inventée alors et ce n’est pas le moindre trait de son caractère.
Nous fîmes alors de la spéléologie intensive avec à la clef, de nombreuses premières, à une époque où cette denrée était encore abondante.
Nanti de ressources physiques superlatives, André Mairey possédait une très forte personnalité. Homme libre, ennemi du paraître, du toc, des idées toutes faites ; une troublante analogie avec ce qu’il y a de meilleur chez Céline qu’il admirait. comme nous tous.
Il était au fond solidement terrien, féru de choses simples et vraies. Mais c’était aussi une nature d’artiste très sensible aux choses de l’art et de la nature, bibliophile, collectionneur de tableaux insolites, musicien instinctif.
Ce praticien de haut niveau (il était médecin chef de l’hôpital de Lure) a laissé là-bas des traces ineffaçables de sa compétence, de son humanité et de son dévouement. Une des caractéristiques du toubib était sa modestie, une extrême réserve sur ce qui le concernait. Au cours de ces années, il ne nous a jamais parlé par exemple de ses trente heures d’angoisse à la Creuse alors que l’eau en furie lui arrivait aux narines ; de ses douloureuses certitudes au chevet de Loubens mourant ; des services rendus durant la dernière guerre qui lui valurent plusieurs distinctions. L’homme était ainsi, mais prompt à se débrider avec les copains, et comment ! (Ah, ces soirées, voire ces nuits, d’après expéditions).
Il m’avait propulsé en 1954 dans l’équipe de la Pierre-Saint-Martin, ce qui ne paraissait pas trop du goût de l’équipe de direction. Et j’ai, un soir, par hasard, au coin d’une tente, surpris cette conversation avec ceux-ci (pour partie, il faut le dire pas très familiarisés avec le monde souterrain !) : " S ’il ne descend pas (il s ’agissait de moi), je ne descends pas non plus ... " ! Nous nous sommes peu après retrouvés ensemble en bas, en compagnie de Casteret , qui avait dit à notre arrivée : " Ah ! Voici les Francs-comtois, ça va changer de style !
Souvenirs chers. Salut toubib !
Robert MAUER Le 29 avril 2006
Le témoignage de Mme Treuthard :
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André Treuthard (♂ 1930, † 29/11/2006 ) & André Mairey (♂ 1914, † 10/04/2006), resteront des amis indissociables et se verront régulièrement jusqu’à la fin de leurs vies.
L’épopée de la Pierre Saint-Martin , combinant des sentiments multiples, de la tragédie à l’enthousiasme , ne peut que souder des pionners de cette trempe.
M. & Mme Mairey seront les médecins traitants de la famille Treuthard.
Le témoignage de Gérard Condé :
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Je suis compositeur et ma première tentative de création : une sorte d’opéra dont le héros rencontrait la déesse Vénus dans une pyramide où elle l’invitait sans façon à la rejoindre : « viens te coucher avec moi dans ce souterrain constellé de diamants ».
Ce n’était pas tout à fait une grotte ... mais Le besoin que je ressentais pour la première fois de composer de la musique, m’avait été inspiré par l’épisode de la grotte dans Pelleas et Mélisande de Debussy. Je ne savais pas écrire la Musique mais j’entendais des mélopées dans ma tête et tout est parti de là…
J’ai du moins écrit les paroles... c’était en 1955 et le docteur Mairey m’a demandé (Peut-être même acheté...) mon manuscrit qu’il a toujours conservé. C’était un premier encouragement et il a été décisif…
Dans les années 58 59 j’ai passé quelques semaines de vacances à Lure chez le docteur Mairey. c’était assez folklorique ....et éducatif à rebours. Je me souviens de ratatouille ou d’omelettes aux champignons improvisées à 1h du matin, de cigares voltigeurs qu’il me laissait fumer à 10 ou 12 ans (je crois bien qu’il m’encourageait mais à l’époque le tabac ne tuait personne, et je n’ai jamais fumé plus tard) et de promenades à bord de sa 203 coupé décapotable … Mais à l’époque je crois qu’il ne faisait déjà plus de spéléologie. André Mairey était quelqu’un d’assez remarquable épris d’Art moderne musique peinture et littérature