Le gouffre de Chèvre Roche - HYEMONDANS

dimanche 30 juillet 2023
par  Claude
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De passage à Hyémondans, nous en profitons pour visiter les trous du coin.
Le gouffre de Chèvre Roche est une petite cavité restée secrète, située dans une falaise du bois du même nom.
Mais laissons l’inventeur, Henry COLLIN dit le père COLLIN, nous narrer sa "première première" en 1967.

« Nous avons rendez-vous avec Guy près du hameau de la Cude pour visiter quelques trous découverts quelques mois avant. Mais il y a un verglas tel que Guy ne s’est pas dérangé. La foret est couverte de neige, rouis le soleil brille, et pour ne pas perdre notre journée, nous partons en exploration voir nos trous. Dans l’un, il y a une trace d’entrée de renard, mais pas trace de sortie ; laissons Goupil dans son royaume, il pourrait prendre ombrage de notre visite.
Nous suivons une falaise, longée par un petit sentier. A chaque fissure du rocher pendent de longues stalactites de glace et il me vient une idée que s’il y avait une entrée au-dessus de nous, nous ne pourrions pas la voir.
Je descends donc à quelque cent mètres au-dessous du sentier sur lequel circulent Bernard et Claude. Je reste en liaison radio avec eux.
A travers les bois dénudés, je distingue au-dessus de Bernard un trou noir, oblique par !’apport à la paroi. Il sera assez facile à atteindre par une petite escalade sans problème. Je demande par radio à Bernard d’aller voir sur place. Il me confirme bien l’existence d’un trou triangulaire de soixante centimètres de côté, avec de nombreuses entrées et sorties de renard.
Je rejoins mes deux compagnons et nous posons nos sacs sur une petite vire devant l’entrée.
Bernard s’enfonce en rampant dans le couloir terreux encombré de pierres et de feuilles mortes. Un coup de lampe révèle que ce couloir a environ dix mètres de long et se termine sur une petite salle qu’il nous frauda atteindre. De toutes façons cette grotte ne figure pas à l’inventaire, nous ferons notre première.
Comme outils nous n’avons qu’une pelle bèche et un crochet à arracher les pommes de terre, cela suffira pour dégager la terre et les pierres. Et nous nous mettons au travail. Chacun à son tour pour creuser la galerie sur une hauteur de vingt centimètres qui suffira à assurer un passage facile, et ramène à reculons les déblais qu’il vient de décrocher. Nous les jetons sur la vire de manière à constituer une petite terrasse limitée par les pierres que nous sortons du trou.
A midi, nous allons déjeuner dans la grotte de Vanne, toute proche, au milieu d’une forêt de stalagmites de glace, et vers trois heures, nous pouvons passer tous les trois dans la petite salle entrevue : hauteur environ un mètre, une petite cheminée où des milliers de tipules que nous avons dérangées font un bruit aussi fort qu’une tempête en forêt.
Sur le côté droit, une fissure qui serait pénétrable si on pouvait faire sauter la stalagmite énorme qui l’obstrue presque entièrement. Nous n’avons pas d’outil pour l’attaquer : nous reviendrons plus tard.
Quinze jours après, nous nous sommes munis d’une massette, d’un ciseau neuf et d’une petite barre à mine. Il neige à gros flocons, et c’est dans vingt centimètres de neige que nous montons à notre grotte. Dès dix heures, je commence à frapper la calcite sur laquelle le ciseau ricoche et refuse d’entrer. Bernard me relaie pendant que Claude achève d’aménager le couloir et la salle en sortant à la surface les pierres qu’il peut décrocher du sol.
La neige s’est arrêtée, et c’est sur la terrasse dégagée que nous prenons notre repas, repas écourté car il faut reprendre le travail qui n’a pas encore pu ébranler le bloc concrétionné. Encore une heure d’efforts à coups de masse et tout a coup, le bloc se fissure et éclates en quelques morceaux que Claude emporte aussitôt. Il y avait bien derrière une galerie, mais il faut encore dégager le passage pour qu’il soit accessible, et après une dernière photo, je me laisse glisser dans une nouvelle salle, suivi de l’équipe. Du plafond pendent des stalactites volumineuses couvertes de mondmilch blanc neigeux. Sur une pierre, un crane très ancien qui semble avoir appartenu à un renard. Par où est-il passé ? A moins qu’il ne soit venu mourir là, avant que le passage ne se soit refermé.
Dans un coin de la salle s’ouvre une galerie en T, très étroite et hérissé de concrétions. La branche inférieure est tellement étroite qu’une jambe y passe à peine, quant à la branche horizontale, elle nous permet à peine de ramper en se déchirant le dos au plafond jusqu’à l’extrémité que nous entrevoyons.
Bernard, après bien des efforts réussit à passer sa tête dans une étroiture qui s’ouvre sur un puits, il voit un semblant de vire à deux mètres, le reste du puits se perd dans l’obscurité mais il existe. Nous n’avons pas d’échelle, personne ne sait où nous sommes, il nous est impossible de continuer. Nous retrouvons la voiture qu’il faut déneiger, et nous rentrons à Lure ou le soir même, (nous sommes le 31 décembre) j’adresse au Président du SCV mes vœux en lui apportant comme étrennes la nouvelle de notre découverte.
Ce n’est que deux mois plus tard que j’envoie un appel urgent à tous les spéléos du groupe pour qu’ils viennent nous aider, je crains que d’autres nous soufflent le fruit de notre travail. Une équipe de pointe, composée d’acrobates s’attaquera au puits, qui en définitive se révèle assez facile, une fois qu’on a pu parcourir à reculons la galerie en T qui le commande.
Je n’ose pas descendre avec eux, ne sachant pas si je pourrai remonter, mais ceux au fond m’appellent en m’assurant de la facilité que j’éprouverai. Je descends à mon tour et au bout de six mètres, j’atterris à côté des camarades rangés contre la paroi.
Devant nous s’étend une salle concrétionnée, le sol est recouvert de calcite blanche, à l’extrémité de cette salle un couloir qui continue la grotte.
Aucun n’a voulu fouler ce sol vierge avant moi, et après avoir photographié le tout je traverse avec émotion la salle "Henri Colin" »





Une entrée très discrète...

Extrait de Chauve-souri-res de 1975.


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