Totes Gebirge - Expé 2021 - Autriche
par
popularité : 2%
Depuis des années, les copains spéléos nous faisaient rêver en racontant leurs souvenirs d’expé Autriche ... Cracus, du GSAM, s’était laissé tenté et ne l’avait pas regretté, en participant à plusieurs éditions dont il était revenu à chaque fois avec des étoiles, heu, des chauve-souris dans les yeux !
Cette année, au détour d’une discussion avec Thomas S, qui participe depuis plus de 20 ans à l’expé, je me rend compte que les dates collent avec mes congés, j’ai le temps, ça me fait rêver, bingo, c’est parti !
Départ du Doubs le 09 août avec Thomas J, Thomas S et Jean-Pierre. Après plus de 9h de route sans encombre, nous arrivons chez Franz où nous retrouvons le reste de l’équipe déjà présents. Une fois les présentations faites, on passe aux choses sérieuses : la préparation des sacs pour le lendemain et surtout la répartition de la bouff et du matériel collectif pour les 10 jours de camp ! Les cordes de cette année ont déjà été montées progressivement par les Autrichiens qui les ont laissées à proximité du camp. Merci à eux !!!
Tout est optimisé au max, pesé, empaqueté, soupesé et les menus réfléchis pour essayer de ne porter que l’essentiel. Les sacs se chargent petit à petit et l’on arrive finalement à tout faire disparaitre du garage de Franz ... Les poids oscilleront entre 22 et 35 kg. Ce sera 27 kg pour ma part, on va déjà tenter comme ça !
Dernière nuit en dur, et le lendemain, départ direction le lac d’Almsee à quelques minutes en voiture, où nous devons suivre la piste le plus loin possible pour gagner un peu de temps (et d’énergie). Malheureusement, la piste a été abîmée par les récentes pluies et sans 4x4, cela parait compromis ... On charge donc au max la voiture de Léa, qui espère pouvoir continuer le plus loin possible avec son Duster et c’est parti à pied !
Arrivés en bout de piste, tout le monde retrouve son sac (on l’avait chargé tant que ça hier soir ?!?), et c’est parti pour l’ascension ! Au programme, 1200 m de D+ pour atteindre le camp. Ca pique un peu, surtout chargés comme des ânes, on a parfois du mal à garder l’équilibre, mais les bâtons aident bien. Le paysage est grandiose, rien que pour ça, ça valait le coup de venir !!!
Chacun arrive à son rythme et je découvre le camp : Eiskapel ! Littéralement une chapelle de karst et de glace ! David s’attelle à sortir le matériel collectif et l’on commence à installer la cuisine, le campement et faire le plein d’eau !
Cherchez le camp !
Ça prend forme et une fois tout le monde arrivés et installés, Yoann et Bérénice nous expliquent les objectifs de cette année et les équipes du lendemain se forment.
Pour ma première sortie Autrichienne, ce sera donc sortie à l’Emmental avec les 2 Thomas. C’est Thomas J qui a trouvé l’entrée en fin d’expédition l’année dernière et les premiers mètres explorés étaient prometteurs. L’objectif pour nous aujourd’hui est donc de trouver la suite, afin de voir le potentiel de cette cavité !
L’Emmentaler tiendra ses promesses car après les premières déceptions dans le réseau du Fromage Pourri, on trouve le puits du Maroille. Beaux joueurs, les 2 Thomas me laissent équiper le puits et je découvre dyneema et as que l’on n’utilise pas au club. Il fait max 3°C sous terre alors l’attente est vite fraiche !!Le méandre que l’on retrouve sous le puits du Maroille est de belle taille et ne semble pas s’arrêter ... Nous en parcourons quelques sections en première avant de s’arrêter devant un puits, il faudra revenir !
TPST : 9h
Pour le 2ème jour, les 2 Thomas sont motivés pour descendre au Dunstloch, afin de continuer l’explo de l’équipe de l’année passée qui s’est arrêtée sur "rien". C’est parti ! Dès l’entrée, l’ambiance est complètement différente d’hier, on descend sur un immense glaçon et en bas du puits, une épaisse couche de neige et des colonnes de glaces nous accueillent. On en retrouvera jusque vers - 100 environ. Les passages s’enchainent, et on arrive au puits du Monstre Chat que Cracus avait fait en première ... Je comprend mieux la description qu’il m’en avait faite ! Un puits immense, un bruit d’eau sourd, une brume épaisse, le tout avec une vire plein vide avec 50 m de gaz en dessous ... Impressionnant !!! La descente s’enchaînent et nous finissons par arriver au point d’arrêt de l’équipe de l’année passée qui se situe en zone active. A partir de là, Thomas S se met à l’équipement et Thomas J et moi sommes chargés de la topo. Ca enchaine, on arrive à équiper hors crue jusqu’à arriver en bas des puits devant un méandre. Ce méandre bien découpé nous mène jusqu’à la salle de confluence des Austèroides où l’on change clairement de couche géologique, on est passés dans la Dolomie et on ne voit pas de suite évidente ... A l’extrémité du méandre, une cascade se jette dans un puits d’une 20aine de mètre. Après un rapide conciliabule autour d’une soupe chaude, il est décidé de descendre cette cascade car les conditions météo annoncées des prochains jours ne permettront peut être pas de revenir voir la suite. C’est donc chose faite mais en bas, on tombe sur un siphon ... Dommage, notre enthousiasme retombe un peu et il est temps de penser à la remontée.
Celle ci s’effectuera lentement, avec un passage du méandre au pied du Monstre Chat que je ne suis pas prête d’oublier. Merci au spit judicieusement ajouté qui a évité que cela ne se transforme en méandre Paradis !
Les organismes sont fatigués et il faut dire que l’on est complètement déphasés : rentrés sous terre à 11h du matin, on est maintenant en pleine nuit et le froid, associé à l’eau du fond, commence à se faire sérieusement sentir. Des siestes seront improvisées tout le long du parcours, voir entre les puits ...
Vers 6h, nous renvoyons enfin la lumière du jour !! On dégustera notre dernière tablette Milka calés contre le rocher du Dunstloch, devant le levé de soleil ... certainement la meilleure que l’on ait jamais mangé !!!
On a mal aux cheveux, mais on est dehors !!
Arrivés au camp, les autres équipes sont au petit déj, on se fait une soupe et une purée, on débrief de la sortie et au lit !!
TPST : 19h
La journée sera donc principalement dédiée à la sieste et au traitement de la topo levée la veille sous terre.
Le surlendemain, on décide de profiter du soleil et ce sera journée prospection. Les paysages sont magnifiques, on en prend plein les yeux et on fait un peu de première !
Le soir, il est prévu le lendemain une nouvelle descente au Dunstloch le lendemain avec pour objectif de prélever de la roche à différents endroits pour analyse. Le méandre Paradis, dont le souvenir est encore assez vif, ne me motive pas des masses ... Mais bon, tant pis, on retente !
Cette fois-ci, on ne répète pas les erreurs précédentes, prépa du matos la veille et départ avant 8h du camp ! Thomas S passe devant et équipe le méandre grand confort avec des "marches", c’est presque un plaisir de le passer !!
Arrivés au carrefour entre l’actif et le fossile Thomas J redescend chercher des échantillons de la zone où nous sommes arrêtés la dernière fois tandis que Thomas S et moi allons continuer l’explo dans le fossile en attendant qu’il nous rejoigne. Mais pas de bol, les ressauts s’enchainent jusqu’à un siphon ... On a beau regarder dans tous les sens, ça queute ... Nous croisons Thomas J qui nous rejoint et après un bon repas, on aperçoit derrière nous une galerie qui n’est pas sur la topo ... Après une dernière tablette de chocolat, c’est parti, on va voir ce que ça donne ! S’ensuit une descente en désescalade de ressauts dans une ambiance terreuse, voir boueuse qui contraste avec le reste de la cavité. Un passage à plat ventre nous mène vers le puits du Lapin derrière lequel ça semble continuer ... On manque de matos, et il commence à se faire tard, on reviendra ! Le réseau Zavatta est donc topographié et c’est la remontée !
Ca s’enchaine bien, et l’on ressort vers 21h sous un orage impressionnant ! TPST : 13h
Petite pause repas réparatrice : avant / après !
Journée repos pour moi au camp le lendemain, mais on finira quand même par enfiler la combi pour aller faire un bout de topo à côté d’Eiskapel !
Un camp confort malgré les conditions spartiates du lieu et les températures fraiches ! Même la source d’eau est à proximité !
Au repas du soir avec le reste de l’équipe, les nouvelles sont plutôt bonnes de leur côté aussi : l’Emmentaler semble tenir toutes ses promesses et arrêt sur rien, avec un puits qui semble atteindre la 100aine de mètres ! Le lendemain, une équipe est donc motivée pour aller voir la suite. David et Yoann, en avant, équipent tandis que Léa et moi sommes chargées de la topo. Ca descend, encore et toujours, l’équipement est confort et efficace, au top ! Après le 1er puits qui fera effectivement quasi 100 m, un second se profile, et il a l’air d’être du même acabit ! L’équipe est ravie, la descente continue toujours ... En bas, une plateforme permet un repas rapide malgré le froid à côté d’un autre puits mais pour la suite, il faudra se rendre à l’évidence, ce ne sera pas pour cette année : manque de cordes ... Remontée confort et rapide. TPST : 7h
2 x 100 m de gaz sous les bottes !
Le lendemain, au réveil, la pluie amorcée dans la soirée continue ... Cela limite le choix des cavités, mais du coup, on se rabat sur le Rauchate de Lucka où une autre équipe a été il y a quelques jours avec pour objectif de jonctionner avec notre réseau. L’idée est donc de continuer à faire la topo car celle existante est très sommaire et pas mal de galeries ne semblent pas avoir été explorées.
On fait de belles découvertes avec le sympathique puits du Dino pour terminer. TPST : 9h
Retour au camp pour commencer à ranger et préparer le départ du lendemain.
La descente se fait sans encombre, avant le traditionnel repas du chevalier et surtout une salutaire DOUCHE, la première depuis notre arrivée en Autriche et séchage du matos dans le jardin de Frantz !!!
A la descente comme à la montée, l’équilibre du chargement est de mise !
Le jardin de Franz transformé en séchoir géant à l’odeur de blaireau !
Au final, une super expérience avec une équipe sympa et engagée, à refaire sans hésiter ! Un grand merci à Yoann et Bérénice pour la gestion et la préparation du camp ainsi qu’à Franz pour son accueil !!
Retour en France le 20 août.
Bilan par Thomas S :
Cette année on aura fait plus de verticales et moins de développement que espéré.
Dans le gouffre du Dunstloch où l’équipe de l’année dernière s’était arrêtée sur un puits nous avons pu descendre d’environ 75m jusqu’à un pseudo collecteur (25l/s) . Deux beaux siphons stoppent notre progression l’un vers l’amont l’autre vers l’aval.
La profondeur atteinte depuis l’entrée du Dunstloch est de 630 m, et le siphon aval découvert cette année devient le point bas du réseau soit environ -750 m (montre altimètre) en dessous de l’entrée du Tunnelhohle.
Le gouffre Emmentaler qui développait 350m pour -47 m à été poursuivi est à pris de l’ampleur. Deux beaux puits de 100m qui s’enchaînent, permettent de descendre à -350 m arrêt sur puits. Ce gouffre distant d’environ 500m du Dunstloch pourrait jonctionner à moins que l’on ne retombe derrière les siphons !
Dans le gouffre du Rauchate de Lucka connu depuis très longtemps, nous avons exploré une suite de puits, arrêt en bas d’un beau P50 sur un méandre impénétrable est ventilé vers -150 m. L’objectif de jonctionner avec notre réseau n’est pas atteint et il faudra venir fouiller à nouveau (puits non descendu). Encore une belle expé avec le soleil presque tous les jours.
Pour ceux qui ne le connaissent pas, le chouette film d’Arnaud Malard réalisé en 2020 :
Un article sur les différentes expé en Autriche dans le Karst Comtois n°2, achat en ligne sur al boutique GIPEK (cliquer sur le logo GIPEK).